dimanche 15 août 2010

Seulement EST avec Denise Desjardins

Je respire profondément jusqu’au bout de mon souffle. Mon diaphragme s’ouvre, se dilate de plus en plus. Aum en expirant, tat en inspirant complètement, un temps d’arrêt ensuite. En respirant ainsi, il me semble avec le aum créer la manifestation, qui avec le tat, revient à moi, et redevient le non-manifesté, le vide. Puis c’est un passage d’un vide à un autre vide, et je plonge à l’intérieur de ce centre, un peu à droite de la poitrine. C’est un gouffre non délimité, la tranquillité du fond des mers, une nuit que rien ne vient interrompre, sans commencement et sans fin.


Il n’y a pas de mot pour décrire cette grandeur sans mesure, où n’existe plus ni toi ni moi, mais une ample plénitude, en moi qui n’est plus moi, qui n’est ni à l’extérieur ni à l’intérieur.


Cette respiration continue. Je me sens avec le aum renvoyer toute peine, toute pensée, comme la marée en se retirant balaye tout ce qui est sur la plage, l’emmenant très au loin. Ainsi me laissant mon désespoir, Iryamani, mon fils, ma mère et mon père.


Tout s’estompe et s’efface comme des fantômes irréels, inutiles et encombrants, ombres sans consistance emportées par le aum de ma respiration.


Seul demeure ce merveilleux vide tissé de plénitude. Mon corps aussi fluide, léger, aérien ; seulement fumée sans densité, une ombre qui se déplace comme un nuage dans l’air. Il peut se mouvoir sans mouvement, en tous sens, s’élever sans effort, sans contrainte. Je le perçois hors de moi, dans cette perspective informelle. Il est inconsistant, désincarné. En quoi suis-je concernée par lui ? Il n’y a pas de Moi, de Je. S’est abolie la distinction entre ce qui est en moi et en dehors.


Seule une large vacuité où se déplace un fantôme de corps évanescent, irréel, qui s’efface et disparaît.


Le Rien qui contient toute chose.


Le Vide qui est plénitude.


Seulement Est.



Denise Desjardins, De Naissance en naissance – Témoignage sur une vie antérieure, La Table Ronde, 1977.

Juste assez pour goûter la Vie...

Au bord de l'eau dans un petit village côtier mexicain, un bateau rentre au port, ramenant plusieurs thons. L'Américain complimente le pêcheur mexicain sur la qualité de ses poissons et lui demande combien de temps il lui a fallu pour les capturer :
" Pas très longtemps ", répond le Mexicain.
" Mais alors, pourquoi n'êtes-vous pas resté en mer plus longtemps pour en attraper plus? " demande l'Américain. Le Mexicain répond que ces quelques poissons suffiront à subvenir aux besoins de sa famille.
L'Américain demande alors : " Mais que faites-vous le reste du temps? "
" Je fais la grasse matinée, je pêche un peu, je joue avec mes enfants, je fais la sieste avec ma femme. Le soir, je vais au village voir mes amis. Nous buvons du vin et jouons de la guitare. J'ai une vie bien remplie ".
L'Américain l'interrompt : " J'ai un MBA de l'université de Harvard et je peux vous aider. Vous devriez commencer par pêcher plus longtemps. Avec les bénéfices dégagés, vous pourriez acheter un plus gros bateau. Avec l'argent que vous rapporterait ce bateau, vous pourriez en acheter un deuxième et ainsi de suite jusqu'à ce que vous possédiez une flotte de chalutiers. Au lieu de vendre vos poissons à un intermédiaire, vous pourriez négocier directement avec l'usine, et même ouvrir votre propre usine. Vous pourriez alors quitter votre petit village pour Mexico City, Los Angeles, puis peut-être New York, d'où vous dirigeriez toutes vos affaires. "
Le Mexicain demande alors : " Combien de temps cela prendrait-il? "
" 15 à 20 ans ", répond le banquier américain.
" Et après? "
" Après, c'est là que ça devient intéressant ", répond l'Américain en riant.
" Quand le moment sera venu, vous pourrez introduire votre société en bourse et vous gagnerez des millions ".
" Des millions? Mais après? "
" Après, vous pourrez prendre votre retraite, habiter dans un petit village côtier, faire la grasse matinée, jouer avec vos petits-enfants, pêcher un peu, faire la sieste avec votre femme et passer vos soirées à boire et à jouer de la guitare avec vos amis. "